L’acide inonde les muscles et provoque une brûlure qui irradie le corps. Les os semblent s’emboîter et se déboîter au fur et à mesure des impacts aux sols. La vision se perd, une humidité trouble les yeux et dresse un rideau opaque. Jamais la sensation d’être un amas de chairs et de muscles n’a été aussi présent dans l’esprit.
Pourquoi continuer la course ? Pourquoi prolonger ce supplice ? Comment s’évader de cette machine qui est en nous et provoque l’addiction ? Une addiction à l’effort, à la performance, à la douleur. Cette volonté de toujours continuer de courir, comme pour repousser sa faiblesse et dépasser ses limites. Découvrir que l’on peut encore aller plus loin. Plus longtemps.
Transformer son corps en un instrument qui se propulse à chaque frappe de nos pieds. Modifier sa musculature en jouant sur des entraînements spécifiques. Constater que ses mollets ont du mal à passer dans nos pantalons. Toutes ces choses qui vous font comprendre que vous faites partie de la catégorie des runners.
La douleur est la compagne qui demande le mariage malgré vos refus incessant.
Elle frappe à la porte durant des kilomètres, certaine qu’elle vous accrochera à son tableau de chasse. La repousser est votre mission. L’éviter votre serment. Mais la douleur est là pour vous rappeler que votre sport mérite des sacrifices.
Il faut l’appréhender, l’apprivoiser, qu’elle ne devienne pas une souffrance. Savoir quand elle va se manifester. Deviner quand elle va vous planter son canif dans la cuisse ou dans le mollet. L’ignorer est une force, mais peut être une source de rupture brutale. Evaluer le degré de l’attaque par rapport à l’effort à fournir, vous permettra de savoir si vous êtes encore apte à continuer le combat. Ou à lâcher la bataille.
Il faut travailler efficacement pour gérer la douleur. La dompter, la maîtriser. Réduire sa nuisance. Certains vous diront que la solution passe par des entraînements ciblés afin de stimuler à petite dose sa douleur et se renforcer à son contact. Construire des barrières sur chacun de ses muscles afin de les rendre plus forts.
Franchir ce mur en vainqueur.
Mais la réponse est mentale. Créer ce verrou intérieur afin de ne pas la laisser décider de votre sort. Se concentrer sur l’effort fourni et l’énergie positive dégagée. Mettre l’accent plus sur la sensation de puissance que sur la difficulté rencontrée. Serrer les dents sans perdre de vu notre jauge interne qui nous alertera en cas de zone rouge.
Garder en tête cette phrase tel un mantra, « No Pain, No Gain, and Keep Running ». La répéter telle une formule mystique et se laisser submerger par sa force…
*la douleur est en moi.